Quatre photographes posent un regard profondément humain et sensible sur des corps et des visages que l’histoire, la société ou le regard dominant ont tenté d’effacer ou de formater. À travers leurs oeuvres, Maude Arsenault, Katherine Turczan, Alexandra Catiere et Gian Losinger explorent, chacun·e à leur manière, une forme d’innocence — celle du regard, du geste, ou d’un moment suspendu — face aux bouleversements du monde. Maude Arsenault nous montre le corps féminin. Trop souvent sexualisé par le regard masculin dans l’histoire de l’art, le «male gaze» est ici transformé. Le corps, frontal, brut est dénué de sensualité, ou peut-être au contraire, est-il augmenté d’une sensualité revendiquée ? L’artiste redonne au sujet féminin sa subjectivité et son autodétermination, une façon authentique de s’approprier son corps et son image. Katherine Turczan capture avec une sensibilité poignante la jeunesse ukrainienne des années 1991 à 2008. Après Tchernobyl et la chute de l’Union soviétique, l’artiste photographie les oubliés de ces traumatismes collectifs et de ces bouleversements profonds. Les visages d’enfants, de femmes, d’adolescentes incarnent une innocence blessée, oubliée des récits officiels, mais gravée dans les plis silencieux de la photographie. Le travail d’Alexandra Catiere parait intemporel. De la Biélorussie, à la France, en passant par les Etats-Unis, elle cherche à transcrire dans ses photographies des instants intimes, fragiles et universels. Des sensations, des émotions qui nous relient toutes et tous. Son appareil photo devient l’outil qui capte une forme d’innocence émotionnelle. La douleur, la tristesse, la mort sont des thèmes qui sont abordés dans son travail sans filtre, avec une sincérité désarmante.